L’enfer c’est les autres !

Nous disons souvent de quelqu’un qu’il est « difficile » en oubliant que ce terme est toujours associé à un préjugé. Et si l’origine du problème était notre façon de voir les choses ?

Imaginez un collègue qui ne fait que tout dénigrer. Impossible d’avoir avec lui une conversation qui ne se termine pas par des invectives. Vous le qualifiez de « difficile », alors qu’il se montre tout simplement désagréable. Et si cette personne était en réalité prisonnière d’elle-même ? Peut-être ne s’aime-t-elle pas et n’a jamais appris à voir le côté positif de chaque situation pour progresser.
Souvent, les êtres négatifs par nature ont appris très tôt qu’il valait mieux ne pas trop attendre de la vie. Ils n’apprécient pas ce qui est beau, libre et vivant, conscients de pouvoir tout perdre d’un instant à l’autre, perspective douloureuse à leurs yeux. Ces personnes souffrent et expriment leur souffrance. L’énergie négative qu’elles dégagent rend leurs rapports aux autres à très complexes. Que pouvez-vous faire pour remédier à cette situation ?

Observez-vous !
Pour commencer, il est nécessaire de se poser les bonnes questions. Et si, au fond, je voulais que cette personne soit comme moi ? Et si je souhaitais qu’elle soit comme je voudrais qu’elle soit ? Cela touche un point crucial de notre propre personnalité. Qu’est-ce que j’attends de l’autre et comment je gère mes attentes non satisfaites ?
Imaginez que vous ayez appris qu’il ne faut pas faire de bruit, ni s’emporter et encore moins se défouler sur les autres sous le coup de l’émotion. Et voilà que vous héritez d’un chef colérique qui vous hurle dessus. Vous vous êtes toujours efforcé de réprimer vos émotions, d’être correct et poli et de ne pas vous emporter, même si vous en aviez envie. Et maintenant, en criant et en s’énervant, votre supérieur donne libre cours à son stress et à sa surcharge mentale. Vous pensez que cette personne devrait tout de même mieux se contrôler. Mais, en réagissant ainsi, vous oubliez du même coup l’essentiel : rares sont les personnes mentalement stables qui attaquent et humilient les autres. Probablement, cette personne se sent honteuse, même si elle ne le montre pas. Elle essaie en permanence de faire autrement, mais son tempérament s’exprime encore et encore.
Vous vous demandez alors : « En quoi son tempérament me concerne-t-il ? Pourquoi dois-je supporter cela ? » En pensant ainsi, vous êtes autocentré. Or, les relations sociales vont toujours du « je » au « tu » et au « nous ». Vous pourriez aussi donner à cette personne, dans le cadre d’une discussion, l’espace nécessaire pour se défouler, évacuer ses émotions. Et ensuite, une fois cette phase achevée, vous contenter de dire : « Pouvons-nous faire une petite pause, puis parler tranquillement de ce qui vous bouleverse et vous pèse ? « 

Quand discuter relève du défi
Un colérique classique ne veut pas vous détruire. Seul quelqu’un assoiffé de pouvoir ou un narcissique procède ainsi. Ces personnes sont tellement blessées intérieurement qu’elles ne trouvent pas d’autres moyens de vivre avec les autres. Parfois, elles ont été formatées dès l’enfance, leur famille les traitant comme des stars. Elle se prennent pour le centre du monde, mais découvrent en grandissant que tout le monde ne partage pas ce point de vue. Elles cherchent alors à s’imposer en attirant l’attention par tous les moyens, car leur survie est en jeu. Se sentir impuissant les rend malades et les fait souffrir, ce qui les pousse à faire souffrir les autres pour ne pas éprouver leur propre sentiment d’insuffisance. Les discussions avec de tels individus sont un vrai défi, car il faut se méfier de leur pouvoir néfaste et destructeur.

Fixez des limites !
Pour nous protéger, nous devons garder nos distances et ne pas prendre personnellement les tentatives de nos interlocuteurs de nous rabaisser. Pour y parvenir, il faut :
– Faire intérieurement un pas de côté et observer leur comportement comme si nous n’étions pas concernés.
Se demander :
– Qu’est-ce qui se passe avec cette personne ? Qu’est-ce que cela révèle d’elle ?
– Qu’est-ce que cette personne me veut ? Où veut-elle que je sois ?
– Que dois-je faire ou ne pas faire ?
Lorsque nous avons répondu à ces questions, nous pouvons dire stop quand nos limites sont franchies.
– Je n’entends plus ce que vous dites, mais comment vous le dites. Quand allons-nous en parler calmement ?
– Je me sens agressé et je ne peux pas avoir de conversation de cette manière.
Souvent, nous hésitons à fixer des limites verbales claires car cela demande un certain courage. Mais ces personnes en ont besoin dans leur quête de reconnaissance. En posant ces limites, vous gagnez leur respect. Il faudrait toujours se poser les questions suivantes :
– Est-ce que j’accepte l’autre tel qu’il / elle est ou doit-il / elle répondre à mes attentes ?
– Quelle attitude puis-je m’autoriser à adopter ?
En tant que coach, je vois des gens lutter contre leur enfermement et leurs peurs intérieures. Elles n’osent pas se mettre en avant, ni fixer des limites, et souffrent face à ceux qui vivent leurs désirs et leurs idées. Au cours d’un coaching, ces clients apprennent à mettre toute leur personnalité à contribution de manière constructive. Elles n’ont alors plus besoin de résoudre leurs désaccords et conflits avec colère ou désespoir, mais le font avec assurance. Elles n’éprouvent plus le besoin d’aller contre l’autre, mais agissent pour elles-mêmes. C’est ce changement d’attitude radical qui leur permet de faire la différence : s’accepter soi-même et accepter l’autre !
Reconnaissez l’autre dans sa singularité et assumez-vous. Vous pourrez alors aborder les personnes « difficiles » de manière constructive.

Evelyn Summhammer

• Evelyn Summhammer est psychologue du travail, psychothérapeute et auteure. Elle est spécialisée en développement personnel et renforcement des potentiels humains.

Article paru dans le magazine allemand Die Mediation II/2023. Traduction : Christel Schirmer

Christel Schirmer

Mon conseil :
– Menez vos discussions en étant clair sur qui vous êtes. Ce que vous aimez et n’aimez pas.
– Montrez votre personnalité authentique, quitte à déplaire.
– N’essayez pas de répondre aux attentes des autres, assumez de les décevoir. Car nous sommes tous différents, chacun porte ses propres souffrances intérieures et nous avons tous le même désir : être vu, être compris et être reconnu – avec toutes nos imperfections.
– N’oubliez jamais : avoir le courage de dire NON à l’autre est une façon de dire OUI à vous-même !

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