Tour d’horizon de la médiation scolaire

Article paru dans Inter-Médiés N°1

“Faire de l’école un espace où le conflit est possible sans mettre en danger l’enfant, l’enseignant, l’institution, le savoir” T. Dudhreuil

Les premières expériences de médiation en milieu scolaire remontent aux années 1970 aux États-Unis, pays où est né le concept de médiation par les pairs : des élèves, sous le nom de conflict managers, pouvaient gérer les petits conflits au sein de leur établissement scolaire par l’écoute, la bienveillance et le dialogue.

Depuis, ces projets ont connu un véritable succès et se sont diffusés partout dans le monde (Australie, Canada, Grande-Bretagne…) jusqu’à arriver à nos portes dans les années 1990. L’implantation de ce concept en France se fera en 1993 à l’initiative de l’Association de médiation de Lyon (Amely), en partenariat avec le GLYSI-CNRS, dans le cadre d’une recherche d’action menée par J.P. Bonafé-Schmitt, chercheur au CNRS, dans des écoles, des collèges et des lycées situés en ZEP. Parallèlement, des plans de lutte contre la violence à l’école sont élaborés par le ministère de l’Éducation nationale, et différentes mesures sont prises dans les écoles, dont la médiation. Mais uniquement sous sa forme institutionnelle, où les médiateurs ont un rôle de régulateurs et de conseillers.

Les choses vont prendre une tournure officielle avec l’initiative de 1992 et la création par le gouvernement d’une délégation ministérielle chargée de la lutte contre les violences et dirigée par Éric Debarbieux, universitaire et directeur de l’observatoire international de la violence à l’école. La priorité est alors mise sur l’amélioration du climat scolaire, la prévention et la formation des équipes éducatives contre tout type de violences : les paroles blessantes, les bousculades, les grossièretés et les humiliations, nommées micro-violences, ainsi que les agressions physiques comme le racket et le harcèlement. Une prise de conscience et des moyens d’action vont être déployés pour lutter contre ces fléaux.

Le conflit est alors envisagé comme une opportunité de changement et d’apaisement, et non plus comme un danger au sein de l’école. Il s’agit, selon T. Dudhreuil de l’institut EuroMédiation « de faire de l’école un espace où le conflit est possible, sans mettre en danger l’enfant, l’enseignant, l’institution, le savoir ; un espace qui tient avec de la loi, du langage, de l’apprentissage ».

C’est ce que souhaitent mettre en place aujourd’hui des associations comme l’Aroéven, MédiActeurs et Génération médiateurs, qui forment à la médiation par les pairs des enseignants et des élèves au sein des établissements scolaires. Leur démarche vise à développer la communication et les habilités sociales des élèves pour contrer les violences susceptibles de mener à l’exclusion ou à la stigmatisation. Si leurs méthodes diffèrent sur le terrain, leur but reste commun : offrir aux élèves un développement de leurs capacités personnelles, relationnelles et psychosociales. La médiation devient alors porteuse d’espoir, et créatrice de liens entre les élèves et les enseignants, les élèves et leurs parents, les élèves entre eux, et même au-delà, avec la société dans laquelle ils vont évoluer.

La présence nécessaire d’une tierce personne

Tous les acteurs de ce dispositif de médiation dans le milieu éducatif partagent la même volonté de réaffirmer la nécessité de faire du lien et de trouver une issue à la crise du lien social. Aujourd’hui, les individus n’arrivent plus à communiquer et à s’écouter, et la présence d’une tierce personne devient nécessaire pour renouer le dialogue en ouvrant de nouvelles possibilités pour sortir des conflits et de l’engrenage de la violence. En commençant dès le plus jeune âge à apprendre aux élèves à développer leurs habilités d’écoute et de dialogue, la formation à la médiation par les pairs est une mesure préventive et non seulement curative. La loi du 8 juillet 2013, dite Loi Peillon, va dans ce sens, dans la mesure où elle accorde une place majeure à la vigilance, pour prévenir et anticiper tout ce qui peut créer des tensions au sein de l’école et encourager tout ce qui peut « améliorer le climat scolaire pour refonder une école sereine et citoyenne ».

                                              Joëlle DUNOYER

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